Je vous le donne en mille Émile ; la France avait du retard en matière d’espionnage au début de la Première Guerre mondiale. Le premier bureau de renseignements fut créé en 1914 en s’appuyant sur le modèle britannique qui avait une longueur d’avance. Cinq bureaux fonctionnaient plus ou moins avec beaucoup de difficultés dans les échanges d’informations et de coordination. Sous la férule d’un bureau de renseignements de contre-espionnage à Paris et de recrutements et de surveillance à Belfort ; un an plus tard les femmes se jetèrent dans la bataille avec un courage et dévouement hors pair et au péril de leur vie. Elles étaient recrutées, payées modestement dans des villages proches des zones de conflit. Après une semaine de formation de base pour un espion, elles se chargeaient de collecter des informations ; la plupart étaient infirmières. Les femmes les plus aisées dans la classe sociale mettaient à disposition leur manoir transformé en hôpital. Édit Cavell, une infirmière espionne britannique, et les espionnes françaises Louise de Bettignies, Marie de Croy sont les plus connues.
La Belgique, du fait de sa position géographique et de sa neutralité dans le conflit était un carrefour idéal pour les espions. Les infirmières espionnes récoltaient des renseignements militaires auprès des familles belges et organisaient des évasions à l’aide du clergé. Plus de trois cents réseaux d’espionnage avec un nombre important de femmes étaient activés, en 1918 en France, en Grande-Bretagne, en Belgique et en Allemagne.
Les deux les plus connus étaient les réseaux :
– « Dame blanche » dirigée par les deux sœurs Tandel. Sur les cent vingt-huit membres du conseil cinquante étaient des femmes. Ce réseau avait collecté le trois-quarts des informations dans les régions occupées.
– « Ramble ou Alice » dirigée par Alice Dubois, de son vrai nom Louise de Bettignies. Grâce à ce réseau près d’un millier de soldats britanniques furent sauvés dans le courant de l’année 1915.
Ces espionnes qui perdent leur vie dans leur engagement total ne sont pas oubliées. Certaines morts comme celle d’Édit Clavell, espionne infirmière britannique, trahie et tuée, servent à la propagande de guerre par le biais d’éditions de cartes postales ou d’affiches.

Louise de Bettignies surnommée la Jeanne d’Arc du Nord qui dirigea le réseau Alice fut emprisonnée jusqu’à sa mort dans un cachot de la forteresse de Siegburg près de Cologne.
La vaillante jeune belge Gabrielle Petit, engagée dans la Croix-Rouge, recrutée par les services britanniques, tient un service de renseignements. Elle fut exécutée par les Allemands à l’âge de vingt-trois ans.
Du côté allemand, mademoiselle Docteur, de son vrai nom Elsbeth Schragmüller, espionne très intelligente, recruteur et formateur d’espions, (dont Mata Hari) qui comprenait parfaitement les enjeux stratégiques de la géopolitique de la guerre. Son parcours d’après-guerre est particulier et beaucoup de zones d’ombre subsistent. Elle meurt en février 1940, sa mort est un mystère et sa tombe introuvable. Elle a inspiré un film.
https://www.youtube.com/watch?v=BwGt3axBoG.
Ces femmes espionnes méritent beaucoup plus, plus de mémoire, plus d’honneur de mémoire.